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Ceci est mon antitestament

dimanche 23 octobre 2011, par François Morency


Pourquoi organiser ses affaires pour s’occuper de sa famille après son décès ? Le testament, serait-il une perte de temps et d’argent ? Le Code civil a déjà tout prévu pour le partage d’une succession sans testament. Vaut-il donc mieux renoncer à ses dernières volontés en faveur des autorités gouvernementales ? Les rebelles — et les spécialistes remettant toujours à plus tard — devront s’attendre à bien des surprises légitimes, s’ils adoptent l’antitestament !

En ce premier jour de novembre de ma dernière année, j’atteste que le présent document constitue, sans aucun remords, mon antitestament. Je recommande mon âme à Dieu, lequel n’est pas obligé de l’accepter. Par cet antitestament, je renonce expressément à préciser mes dernières volontés dans un testament. Je refuse d’en rédiger un.

1. Ignorant comment organiser les affaires de ma succession, ignorant quand je décèderai, ou quelles seront mes dettes ou les valeurs de mon patrimoine lors de mon décès, je me sens complètement désorienté pour prévoir un quelconque scénario pour mon testament.

2. À la limite, si je tombe gravement malade et si mes jours sont comptés, le médecin pourra toujours m’indiquer le moment opportun pour rédiger ce testament. Je ne crois pas qu’un antitestament m’empêchera de profiter pleinement de la vie.

3. Étant profondément convaincu que les bureaucrates sont plus compétents et beaucoup mieux qualifiés que moi, je les laisse choisir des exécuteurs pour régler ma succession. Je leur accorde l’entière liberté de partager ma succession comme il leur plaira et, surtout, de la manière la plus simple pour eux.

4. De mon vivant, je n’ai jamais voulu offenser qui que ce soit et j’ai toujours préféré éviter de me compromettre en faisant des choix importants. En conséquence, j’exige que des fonctionnaires choisissent arbitrairement les gardiens de mes enfants mineurs, sans égard aux souhaits de mes enfants.

5. Le curateur public et les services sociaux pourront s’occuper de mes enfants jusqu’à leur majorité. Par la suite, mes chers enfants auront enfin le droit de s’amuser avec mon argent, en flambant tout leur héritage.

6. Après mon décès, il est très possible que mon conjoint de fait doive se débrouiller tout seul avec nos enfants. Il ne recevra aucune part de ma succession.

7. Je ne veux négliger aucune dépense pour régler ma succession. Obligatoirement, les exécuteurs désignés auront recours à des cautionnements en garantie, à une prise d’inventaire détaillée de mon patrimoine et à la souscription d’assurances responsabilités. Je reconnais que ces primes auraient pu être évitées, si j’avais seulement voulu faire un testament.

8. Je consens à ce que tous les moyens soient entrepris pour réparer ma négligence. Ils devront payer les frais d’homologation de ma succession, les honoraires juridiques ainsi que ceux des comptables. Des liquidateurs, inconnus à ma famille, seront très bien rémunérés pour leurs tâches ingrates.

9. J’imagine très bien que des cousins éloignés — se croyant mes héritiers — essaieront de rafler tous les biens de ma résidence.

10. Ironiquement, je déshérite immédiatement toutes les œuvres et toutes les associations qui me tenaient à cœur de mon vivant.

11. J’accepte déjà que tout ce que j’ai accumulé durant ma vie puisse être gaspillé en frais d’avocats, d’experts et de justice pour régler les chicanes entre mes héritiers. Je suis conscient qu’en refusant de faire un testament, je cause un stress important à mes enfants et j’encourage la zizanie au sein de ma famille.

12. À sa seule discrétion et à n’importe quel prix, je mandate la Cour pour vendre rapidement tous mes actifs afin de payer en priorité mes créanciers.

13. Aucun de mes souvenirs de famille, de mes bijoux, de mes effets personnels ne pourra être donné à mes enfants en mémoire de moi. Au contraire, tous mes effets seront liquidés rapidement afin d’en partager le produit en premier à mes créanciers, puis – s’il en reste — aux membres de ma famille, naturellement selon les règles et les proportions légales.

14. Je comprends que les gouvernements ont toujours de grands besoins d’argent. Je ne donne aucune directive aux fonctionnaires afin d’organiser le règlement ordonné de ma succession et de minimiser tous les impôts exigibles lors de mon décès. En toute naïveté, je suis donc heureux de faire cette dernière contribution et de partir en paix.

15. J’ignore encore comment partager toutes les participations que j’ai pu acquérir dans des entreprises. Je préfère laisser mes partenaires se battre entre eux pour trouver un terrain d’entente avec ma famille.

16. Après une vie d’effort, je reconnais que le règlement de ma succession puisse être désappointant, dispendieux, confus et même blessant.

En foi de quoi, en pleine possession de mes facultés, j’affirme solennellement que je n’ai jamais signé quelque document pouvant exprimer mes dernières volontés, et ce, à quelque moment que ce soit de ma vie. J’y renonce expressément. De toute façon, je ne serai plus là.

Jamais signé, jamais enregistré et jamais déclaré par moi. J’ai toujours été trop occupé — trop agacé par ce sujet — pour prendre le temps de rédiger correctement un testament et m’assurer que mes dernières volontés puissent être respectées dans le meilleur intérêt de ma famille et de mes enfants. Je préfère ne rien faire et laisser faire grâce à cet antitestament.

Cet antitestament a été signé – sans témoin — au Cimetière de la Côte-des-Neiges, ce 1er novembre de ma dernière année,

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